Formation initiale des enseignants : la CFDT demande le retrait de la réforme

La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques demande le retrait de la réforme de la formation initiale des enseignant.es et des CPE. Les projets de textes relatifs aux nouveaux concours de recrutement des enseignant.e.s et CPE communiqués sont annonciateurs d’un nouvel accident industriel.

Des projets de décrets inadmissibles

Les projets de textes modifiant les décrets statutaires présentés aux organisations syndicales le 29 mai 2024 représentent une attaque sans précédent des règles qui définissent le statut de la fonction publique.
Le contenu de l’ensemble de ces documents ne convient absolument pas à la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques qui saisit d’ores et déjà les juridictions compétentes.
Elle votera contre ces textes au CSA MENJ du 11 juin 2024.

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Depuis la précédente réforme Blanquer en 2020, les concours de recrutement n’ont plus aucun sens.
Aujourd’hui, les projets de textes qui les encadrent s’emballent
. La volonté d’abaisser à nouveau le niveau de recrutement à bac +3 correspondrait à celle d’augmenter le vivier de recrutement. Sauf qu’augmenter le vivier ne signifie pas pour autant augmenter le nombre de candidats.

Ce qui compte, c’est l’attractivité du métier : la rémunération, les conditions de travail, les perspectives professionnelles. Les conditions d’étude pendant la formation initiale sont un élément déterminant. Les projets de texte communiqués ne vont pas du tout dans ce sens.

Les projets de textes créent des ovnis statutaires qui sont inacceptables et soulèvent de nombreuses questions laissées sans réponse :

  • Un.e lauréat.de d’un concours de la fonction publique ne sera ni fonctionnaire stagiaire ni élève fonctionnaire pendant sa première année de formation.
    Nous aurions et de loin préféré soit un statut comparable à celui des élèves de l’ENS, soit un indice de début de carrière comme pour les anciens élèves de l’IRA.
  • Pendant cette première année de formation, les étudiant.e.s percevront une gratification et non une rémunération sans lien statutaire clair avec l’employeur qui les recrute, sans droits sociaux sécurisant leur parcours professionnel.
  • L’astreinte pour les titularisés à servir dans leur corps d’affectation pendant une période de quatre ans est injustifiée.
    Les lauréats ne tirent aucun avantage statutaire de leur concours la première année de leur formation et en cas de démission ils auraient à rembourser une somme dont les modalités de calcul ne sont pas encore connues.

« Le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l’Etat et de ses établissements publics n’est pas applicable aux lauréats des concours (…) durant leur première année de formation et le cas échéant, son redoublement »

A l’issue des premières réunions de concertation, de nombreuses questions importantes pour les étudiantes et étudiants, pour les personnels des INSPE et des universités restent toujours sans réponse opérationnelle et cohérente.

  • « Établissement d’enseignement supérieur » remplacé par « organisme de formation au sein d’une académie ». Cela signifie-t-il la mise hors-jeu des Inspé ?
    Quel va-t-être le statut de ces « organismes de formation » qui devront nécessairement délivrer un titre universitaire de master pour les lauréats qui ont besoin d’un bac +5 pour être titularisés ?
  • Pour le 2nd degré, dans quelle académie s’effectuera la formation initiale des lauréats ?
    Un lauréat de la Réunion, par exemple, détenteur d’une licence, peut-il être affecté en Île de France pour 2 ans ? Si tel devait être le cas, dans quelles conditions cet étudiant pourrait-il financer sa première année de formation sans rémunération et avec une simple « gratification » de 900 € ?
  • Quid des congés maternité pour les lauréates concernées la première année de leur formation ?
  • Quid de la prise en charge d’un éventuel accident du travail pendant la première année de formation ?
  • Quels critères pour demander deux ans de formation à certains lauréats disposant déjà d’un M1 quand d’autres n’auront qu’une seule année et qu’ils n’ont peut-être pas de M1?
  • Et plus généralement, combien de profils de lauréats différents cette réforme va-t-elle engendrer ?

Ce que prévoient les textes

Le projet de décret modifie le niveau de diplôme requis pour se porter candidat au concours.
Ainsi, pour les concours externes et externes spéciaux du CRPE, Capes, Capeps, Capet, CAPLP et concours de recrutement des CPE, peuvent se présenter les candidats justifiant, à la date de publication des résultats d’admissibilité, d’une inscription en dernière année d’études en vue de l’obtention d’une licence ou d’un titre ou diplôme reconnu équivalent par le ministre chargé de l’éducation.

Mesures spécifiques

Pour les professeurs des écoles, la réforme de la formation initiale prévoit la création d’une LPPE (licence de préparation au professorat des écoles) agréée par le MENJ et le MESR.
Le texte prévoit que sont dispensés des épreuves d’admissibilité du concours externe et des concours externes spéciaux les candidats justifiant d’une inscription en dernière année d’études en vue de l’obtention d’une LPPE et ayant validé la première et la deuxième années selon des modalités fixées par un arrêté du ministre chargé de l’éducation nationale et du ministre chargé de l’enseignement supérieur (à venir).

Pour les professeurs de lycée professionnel, le projet de texte prévoit, dans les spécialités professionnelles, d’étendre l’accès aux candidats qui justifient de sept années d’une pratique professionnelle ou d’enseignement d’une telle pratique et d’un diplôme de niveau 4.
Les candidats reçus au concours ne détenant pas une licence (ou titre ou diplôme reconnu équivalent) lors de la rentrée suivant leur réussite au concours gardent le bénéfice de celui-ci jusqu’à la rentrée scolaire suivante.

Modalités

Les lauréats des concours bénéficient d’une formation initiale dans les conditions définies par arrêté des ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur (à venir), visant l’acquisition des compétences nécessaires à l’exercice du métier. Cette formation comprend des périodes de mise en situation professionnelle. Elle est accompagnée d’un tutorat et est adaptée pour tenir compte du parcours antérieur des lauréats :

  • Elle est d’une durée de deux ans pour les lauréats du concours externe titulaire d’une licence (ou équivalent).
    La première année de formation, les lauréats bénéficient d’une gratification dans les conditions fixées par le ministre de l’éducation nationale, au titre notamment de l’article L. 124-6 du code de l’éducation.
    Après validation de la première année de formation dans les conditions prévues par arrêté des ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur (à venir), ils sont nommés stagiaires pour une durée d’un an et affectés par le ministre chargé de l’éducation nationale dans la même académie.
    Les lauréats qui n’ont pas été nommés stagiaires, le cas échéant à l’issue d’un redoublement, perdent le bénéfice du concours.
  • Elle est d’une durée d’un an, avec un statut de fonctionnaires stagiaires, pour les lauréats du concours externe bénéficiant d’une dispense de condition de diplôme ou ayant validé une première année de formation conduisant au diplôme national de master (ou équivalent) et pour les lauréats du concours interne (3 ans dans la fonction publique) et du troisième concours (5 ans d’activité professionnelle).
  • Par dérogation, les lauréats du concours externe ayant validé une première année de formation conduisant au diplôme national de master [ou équivalent] peuvent être soumis, dans des conditions prévues par arrêté des ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur (à venir), à l’obligation d’effectuer la formation de deux ans.

Titularisation après l’obtention du master

Pour être titularisés, sauf dispense de condition de diplômes, les stagiaires doivent justifier de la détention d’un diplôme national de master (ou équivalent) par le ministre chargé de l’éducation.
Lorsqu’ils ne justifient pas de cette détention, mais sont estimés aptes à être titularisés, ils bénéficient d’une prolongation de la durée du stage d’une année. S’ils justifient à l’issue de cette prolongation de la détention d’un titre ou diplôme requis, ils sont titularisés. Dans le cas contraire, ils sont licenciés de plein droit ou réintégrés dans leur corps ou cadre d’emplois s’ils avaient déjà la qualité de fonctionnaire.

 

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La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques, au CSA MENJ du 11.06.2024, votera contre ces textes qui ne correspondent en rien à nos revendications portées depuis la mastérisation il y a plus de 15 ans.
Cette réforme devait stabiliser, sécuriser le parcours de formation initiale pour le rendre plus attractif. Il n’en est rien.
Cette réforme est une attaque sans précédent des conditions d’accès à la fonction publique et elle ne garantira pas deux ans de formation systématique à tous les lauréats. Il est encore temps de renoncer.
La seule issue constructive est de reprendre les enjeux de la formation, du recrutement et de l’attractivité sur des bases solides, partagées avec toutes les parties prenantes. L’entêtement du gouvernement risque de conduire les professionnels et tout le système d’éducation et de formation vers un accident industriel sans précédent.