DNB 2026 : un pas de plus vers l’école du tri

La session 2026 du DNB va être l’occasion d’un certain nombre de changements et, autant le dire, aucun ne va dans un sens que nous apprécions.

Les changements prévus pour le DNB 2026 se feront au détriment des élèves les plus fragiles. À la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques, nous réaffirmons qu’une véritable ambition pour le collège doit passer par la confiance dans le travail des équipes, la reconnaissance du rôle du contrôle continu et la mise en place de conditions d’apprentissage qui permettront à tous les élèves de maîtriser un socle commun. Nous sommes opposés la logique du tri.

Modalités d’attribution du DNB – Diplôme National du Brevet

Pour avoir le DNB, il faudra obtenir une moyenne supérieure ou égale à 10/20. Comment sera-t-elle calculée ? Désormais, le niveau atteint dans les différents domaines et sous-domaines du socle commun de connaissances et de compétences ne sera plus du tout pris en compte. En effet, un savant calcul de moyenne des moyennes sur 20 de l’année de troisième des enseignements obligatoires (auquel pourront s’ajouter les points au-dessus de 10 d’un enseignement facultatif) déterminera une note sur 20 de contrôle continu. Elle ne comptera que pour 40 % du total.
Les 60 % restants seront le résultat de la moyenne des notes obtenues aux épreuves terminales. Chaque épreuve sera notée sur 20 (nouveauté quand jusqu’en 2025 le français, les maths et l’oral étaient sur 100, alors que les épreuves d’Histoire-Géo-EMC et Sciences étaient sur 50) et chaque épreuve comptera coefficient 2… sauf la sous-épreuve His-Géo, sur 20, coefficient 1,5 et la sous-épreuve EMC, sur 20, coefficient 0,5 !

Oui, oui, 0,5 pour l’Enseignement Moral et Civique… Et pourquoi l’EMC a-t-elle désormais une note sur 20 distincte de la note d’His-Géo ? Pour montrer combien cette discipline est essentielle aux yeux du gouvernement. Importance dont il a fait la démonstration en doublant l’horaire d’enseignement (non, c’est une blague : les 18 h qui auraient doublé l’horaire ne sont pas financées, ce sont les heures de « projet » qui ne rentrent pas dans les emplois du temps) et en distinguant sa note de celle d’histoire-géo… note qui se voit gratifiée d’un coefficient 0,5…. Vous aimez les choses cohérentes ? ne cherchez pas, ce n’est pas avec la politique autour de l’EMC que vous trouverez !

La cohérence pourrait peut-être se trouver dans les réponses aux questions : « mais pourquoi donc remplacer le contrôle continu basé sur les compétences par une moyenne des moyennes annuelles ? » ainsi que « mais pourquoi diminuer à 40 % la part de contrôle continu ? ».

En effet, là le projet est clair : pour nos dirigeants, un diplôme n’a de la valeur que s’il trie et exclut les plus fragiles.

Toute ressemblance avec le reste du « Choc des savoirs » et les groupes « de niveaux / de besoin » n’est absolument pas une coïncidence. La cohérence est là : un projet élitiste et rétrograde qui ne prend en compte ni la réalité de ce qu’est un collégien, ni les avis des professionnels sur le terrain, ni même ceux des Inspecteurs Généraux qui ont étudié les effets de la mise en œuvre des groupes en maths et français. À la CFDT Éducation Formation recherche Publiques ce projet nous le rejetons.

Ce qui nous semblerait, au contraire, porteur de sens, ce serait de se donner les moyens de permettre à tous les élèves d’acquérir un socle commun de compétences et de connaissances en fin de collège.

Autres nouveautés du DNB : modifications des épreuves

Mais il y a d’autres nouveautés avec, aussi, des modifications des épreuves elles-mêmes. En l’absence de sujets zéro à l’heure où nous écrivons cet article, nous pouvons seulement nous baser sur la note de service « DNB 2026 ». Les principaux changements annoncés concernent les épreuves de mathématiques, d’histoire-géographie et l’oral.

Mathématiques

En mathématiques, la première partie de l’épreuve, 20 minutes, portera sur des « automatismes » et se fera sans calculatrice. Cette partie sera notée sur 6, soit 30 % du total de la note. Que sont ces automatismes ? Deux exemples : « Simplifier, comparer des fractions, calculer avec des fractions », « Calculer la valeur d’une expression algébrique y compris avec des puissances, sans technicité excessive » …

Histoire-Géographie

En histoire-géographie, c’est l’exercice du développement construit qui va connaître deux changements. Sa part dans la note finale va augmenter, cette seule question sera notée sur 18 points sur les 40* de l’épreuve (note qui sera ramenée sur 20 pour sa prise en compte dans le calcul de la moyenne pour obtenir le DNB), soit 45 % de la note finale. De plus, alors que jusqu’à présent pour cet exercice noté sur 14 la consigne était toujours ainsi formulée « Dans un développement construit d’une vingtaine de lignes… » , dans la nouvelle note de service il est noté : « un développement construit, d’au moins 30 lignes » (pour la série générale). En résumé : un niveau d’exigence plus important et une très grosse part de la note finale.

Épreuve orale

Pour l’épreuve orale, la nouveauté concerne la répartition des points. Désormais notée sur 20 comme toutes les autres épreuves, il y aura désormais 8 points pour la maîtrise de l’expression orale et 12 points pour la maîtrise du sujet présenté ; jusque-là c’était deux fois 50 points.

Comment interpréter ces évolutions ?

Pour les trois épreuves, les modifications imposées ont pour point commun d’aller dans le sens apparent d’épreuves plus exigeantes d’un point de vue académique. En mathématiques : un parfum de retour au bon vieux temps où l’on savait se débrouiller sans calculatrice. En histoire-géographie, un développement construit qui cherche à se rapprocher de la dissertation du lycée. Et, à l’oral, un retour en arrière flagrant, alors que par ailleurs il est admis qu’il est désormais essentiel de valoriser la capacité à s’exprimer correctement avec un vocabulaire adapté mais aussi savoir formuler un point de vue personnel !

Quel est l’objectif du ministère ?

Ce n’est pas si simple à déterminer tellement, pour nous, cela manque de sens. Le plus certain, c’est la volonté d’afficher plus de rigueur et d’exigence. On peut s’interroger sur l’existence d’une volonté de faire diminuer le taux de réussite à l’examen, dans la ligne des mesures du Choc des savoirs et de ses mesures qui ont pour objet de trier et exclure les plus fragiles. La crainte existe pour la nouveauté des 6 points dédiés aux automatismes en mathématiques et pour la modification concernant la notation de l’oral. La crainte est très forte et documentée pour le passage à 18 points du développement construit en histoire-géographie. Jusque-là, cette question est systématiquement la moins bien réussie, avec un taux relativement important d’élèves qui ne s’essaient même pas à l’exercice. L’exercice est très discriminant pour les élèves les plus fragiles. Dans l’académie de Versailles, l’inspection a recensé environ 20 % de développements construits non réalisés pour la session 2025… Quant à l’exigence de « au moins trente lignes », au-delà du fait que les élèves en réussite faisaient déjà plus de 20 lignes, cela pose aussi la question du niveau d’approfondissement attendu pour tous les chapitres, alors que les programmes sont déjà très lourds pour l’horaire dédié à ces enseignements.
Nous faisons aussi une autre hypothèse, l’une n’excluant pas l’autre d’ailleurs : une forme de pensée magique qui revient à penser que durcir les conditions rendra les élèves plus efficaces, plus motivés. Cette idée avait d’ailleurs été exprimée par la Degesco lors du passage des textes sur le DNB 2026 en CSE. Malheureusement, nos arguments sur la réalité des adolescents d’aujourd’hui et sur le fait que tout n’est pas uniquement question de volonté n’ont pas été entendus !

Cette réforme du DNB ne va donc pas dans le sens d’une école plus juste ou plus efficace. Derrière l’affichage d’une exigence renforcée, c’est la poursuite de la logique de tri, qui va seulement sanctionner ceux qui auraient besoin d’être accompagnés. Nous refusons cette vision réductrice de l’école.